Moissac, l’incontournable… - Le blog de monsetta "au gré des jours, au fil du temps"

Passer de Maguelonne à l’architecture austère pour aller musarder dans le cloître roman de Moissac si finement ouvragé, apportait une touche finale à mes excursions estivales.

Durant plus de 800 ans moines et religieux ont vécu dans l’abbaye Saint-Pierre de Moissac, dont le cloître et le grand portail de l’église ont été classés au patrimoine mondial par l’UNESCO en 1998.

Depuis des siècles l’Abbaye Saint Pierre est une étape majeure pour les pèlerins en route pour Saint Jacques de Compostelle. La légende rapportée par les moines de l’Abbaye mentionne sa fondation au VI° siècle par le roi Clovis en personne ! En réalité son édification date de la fin du VIII° siècle, époque où des moines bénédictins s’installent au pied des derniers coteaux du Quercy, près de la confluence du Tarn et de la Garonne. Deux siècles plus tard l’abbaye devient une des plus importantes du Sud-Ouest de la France grâce à son affiliation à l’abbaye de Cluny. Au début du XII° plus de 100 moines y vivent en respectant la règle de St Benoît et laissent pour la postérité manuscrits et enluminures aujourd’hui conservés à la Bibliothèque Nationale de France.

Manuscrits du XII° (BNF)

La Révolution mit un terme à la vie communautaire et engendra la vente des bâtiments comme biens nationaux. Pour comble de malheur au XIX° siècle le passage de la voie ferrée Bordeaux-Sète entraina la destruction du réfectoire médiéval jouxtant le cloître et sépara à jamais l’ensemble abbatial de l’ancienne Hôtellerie du monastère. Seule rescapée une petite chapelle dédiée à Sainte-Foy conserve les vestiges d’un décor de fresques murales réalisées à la fin du XII^e siècle. On y accède en descendant un court escalier de pierre qui débouche sur une petite salle voûtée décorée par un opulent arbre de Jessé aux harmonies de bleus, rouges, et bruns…

Mais revenons au cloître par un accès aménagé depuis la grande salle de billetterie et d’exposition située dans un bâti latéral. A peine franchi le seuil, le regard glisse le long de colonnades qui enserrent le carré du parterre. Je reste sous le charme dégagé par cet ensemble aux proportions parfaites.

A chacun de mes pas en levant les yeux je peux m’attarder sur les riches décors des chapiteaux supportés par de fines colonnettes. Achevé en 1100 ce cloître est un des plus grands et mieux conservés de l’époque romane. Il est célèbre pour la variété et la richesse des sculptures qui se déploient sur 8 piliers et 76 chapiteaux. Plus de la moitié représentent des épisodes de la Bible, du Nouveau Testament, de la vie des Saints. D’autres évoquent la beauté et l’abondance de la Création : oiseaux entrelacés, palmettes, rosaces et végétaux.

Chapiteaux et Apôtres

Les bas reliefs des piliers figurent les 12 apôtres, ceux-ci étant les piliers de l’Église. Gravés au dessus de leurs têtes figurent leurs noms : Saint Philippe, Saint Matthieu, Saint Paul, Saint Pierre, Saint Jacques, Saint Jean, St André…j’essaie d’en déchiffrer quelques uns, tout comme je tente de retrouver sur l’ enfilade de colonnettes à chapiteaux des scènes comme le sacrifice d’Abraham, l’histoire d’Abel et Cain, David et Goliath, le festin d’Hérode, la décollation de St Jean Baptiste, le bon Samaritain, la tentation du Christ, les noces de Cana, le martyre de St Saturnin…épuisant ! Plus faciles à identifier des figures monstrueuses et des personnages fantastiques, le tout agrémenté de décor végétal, feuilles d’acanthe, palmes, pommes de pin, lions, aigles, poissons…Face à la colonnade de la galerie nord une exposition temporaire de photos d’art sublime certains détails des chapiteaux.

Exposition temporaire de photos

Il est temps de quitter les lieux pour aller voir ce qui normalement est le début de la visite de l’Abbaye : son monumental portail donnant accès à l’église abbatiale, aujourd’hui paroissiale, et s’ouvrant sur la grande place de la ville médiévale.

Daté du XII° - la surélévation gothique en brique est du XV°- c’est un des plus grands portails de l’époque romane et aussi un des plus abondamment sculptés. Son tympan inspiré par une des visions de l’Apocalypse de St Jean figure le retour du Christ sur Terre à la fin des temps : Il trône au centre, en majesté. Les symboles des quatre évangélistes, le taureau, l’aigle, l’ange, le lion l’entourent... Le tympan repose sur un linteau orné de rosaces probablement récupéré d’un monument romain. Le trumeau central, porte trois couples de lions et de lionnes croisés, symbole d'une force ascensionnelle irrésistible. Les bas-reliefs sur les côtés relatent l’enfance du Christ. Toute l’iconographie est au service de l'éducation religieuse et de l'élévation spirituelle des fidèles.

Quelques pas pour traverser un porche bas noyé dans la pénombre avant de pousser la porte d’entrée de l’église et rester surprise face à la magnitude de la nef qui , baignée d’une douce lumière, s’offre au regard . Elle est essentiellement dans son état du XV^e siècle avec ses voûtes d’ogives, et ses murs rosés peints de sobres motifs géométriques. Tout en marchant j’admire de très belles sculptures dont un Christ roman en bois polychrome ainsi qu’ une imposante Mise au tombeau du XV° siècle, grandeur nature.

Décidemment ce parcours historico-artistique éveille en moi l’envie de poursuivre les découvertes pour quelques heures encore et c’est par Lauzerte sur le Chemin de St Jacques à quelques kilomètres de Moissac, que je termine mon « tourisme culturel » estival !