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Francesc Ferrer , un pédagogue oublié ( suite et fin )

Portrait photo de Francesc Ferrer

Portrait photo de Francesc Ferrer

Voici la suite et fin de l'article précédent consacré au pédagogue catalan Francesc Ferrer.

La mise en page ne comporte pas toutes les illustrations souhaitées car la nouvelle plateforme d'OverBlog ne s'y prête pas, ce que je regrette car j'aime bien les images surtout porteuses de sens! mais patience un album sur le sujet est pour bientôt!
 

Tous les élèves grâce à l’École Moderne doivent pouvoir suivre la devise « mens sana in corpore sano » . Aussi Ferrer va-t-il faire porter ses efforts sur l’hygiène. La salubrité des édifices scolaires devient une priorité. La prévention des maladies sera réalisée par la visite d’un médecin scolaire qui déterminera si un enfant peut venir à l’école sans risquer de contaminer ses camarades. On développera l’éducation physique et sportive en fonction des capacités de chaque enfant. Le 15 décembre 1901, Ferrer ouvre un cycle de conférences publiques et dominicales où l’on parlera, certes de pédagogie, mais dont le caractère dominant sera l’éducation des masses. On retrouve là son esprit provocateur et son souci de faire, dans le cadre de l’école moderne, œuvre d’instruction plus généralisée. Ferrer part du principe que l’on ne changera pas l’école de demain si on ne change pas les hommes d’aujourd’hui et postule que l’émancipation de l'individu par l'instruction et l'éducation aboutira naturellement à la transformation de la société et à l’avènement de l’anarchie « l'unique et véritable ordre social susceptible d'aplanir toutes les difficultés et de produire l'harmonie universelle par l'accord mutuel ».

Par ses idées Ferrer ne pouvait que s’attirer le mécontentement et la colère des autorités religieuses et des milieux monarchistes et conservateurs qui voyaient en son œuvre ce qu’elles redoutaient le plus : l’autonomie et la capacité d’analyse données à ceux que le système politique et éducatif maintenait dans un état de grande ignorance. Deux incidents majeurs leur permettront d’en finir avec le pédagogue militant.

 

 

 

Attentat du 31 mai 1906 (Madrid)

Attentat du 31 mai 1906 (Madrid)

 Le 31 mai 1906, jour de son mariage à Madrid, le roi Alfonso XIII échappe de peu à un attentat . Son auteur, Mateo Morral, a été un temps employé à la librairie de l'École Moderne. L'occasion est trop belle pour les adversaires de Ferrer qui  est  aussitôt arrêté et son école fermée. mois Reconnu innocent il est acquitté mais l’école de Barcelone et ses filiales demeurent fermées. Il tente alors le même projet en France puis en Belgique, où il fonde  la Ligue Internationale pour l'Éducation Rationnelle de l'Enfance.

Le 1°  septembre 1909 Ferrer au cours d’un séjour en Catalogne est de nouveau arrêté à  la suite  des évènements de la Setmana Tràgica à Barcelone . En juillet les ouvriers à Madrid et Barcelone s’étaient soulevés contre la guerre coloniale au Maroc refusant l’engagement forcé d’appelés et réservistes issus du peuple. Le conflit dégénère. La loi martiale est déclarée et les forces armées interviennent  d’autant plus durement que des rumeurs circulent quant à l’affiliation séparatiste et républicaine des insurgés à Barcelone. Durant durant une semaine la ville est à feu et à sang. La répression est féroce et arbitraire. Dénoncé par des prélats barcelonais comme émeutier Ferrer malgré l'absence de preuves, est arrêté et jugé coupable par un tribunal militaire . Il  est accusé d'être l'un des instigateurs de l’insurrection et condamné à mort.

 

Setmana Tràgica septembre 1909 (Barcelona)

Setmana Tràgica septembre 1909 (Barcelona)

La nouvelle fait rapidement le tour du mouvement ouvrier international. On sonne l’alarme. Il faut en appeler au peuple, lui faire connaître cette « noble figure »! Des comités de défense se créent un peu partout. Au bout de quelques semaines, le nom de Ferrer est sur toutes les lèvres. Les militantes et les militants se prennent à espérer car, comme en une réminiscence de l’affaire Dreyfus, l’ensemble du camp « progressiste » se met à vibrer pour le prisonnier. Les intellectuels pétitionnent. La CGT fait voter des ordres du jour. Des anarchistes à certains républicains, en passant par les socialistes, libres penseurs et humanistes divers, des centaines de milliers de voix conspuent le monarque espagnol Alphonse XIII. Mais la campagne mondiale en sa faveur ne suffit pas à empêcher le tragique dénouement. Le 13 octobre, à l’aube, Ferrer est fusillé et paye de sa vie ses propositions progressistes qui visaient à sortir l’Espagne de l’obscurantisme

Quarante ans plus tard , en 1948, Albert Camus écrit en dédicace du livre de la fille de Ferrer, Sol Ferrer,  « Francisco Ferrer, l’homme , l’éducateur, le militant, le martyr » :

« Francisco FERRER pensait que nul n’est méchant volontairement et que tout le mal qui est dans le monde vient de l’ignorance. C’est pourquoi les ignorants l’ont assassiné et l’ignorance criminelle se perpétue encore aujourd’hui à travers de nouvelles et inlassables inquisitions. »

Que reste-il de  de toutes ces avancées pédagogiques ?

Plus de 100 000 enseignants s’inspirent actuellement et directement des méthodes de Pédagogie Active  de Freinet, en France et dans le monde.

22 000  écoles Montessori s’appuient en Europe sur les travaux de la scientifique et pédagogue italienne, pour qui  l'éducation n’est pas uniquement une transmission de savoirs.

L’École des Maîtres «  Rosa Sensat » en Catalogne, grâce à l’outil informatique contribue à la formation d’ instituteurs et institutrices catalans adeptes de la pédagogie de sa fondatrice Rosa Sensat, qui s’appuie sur le jeu comme outil de développement cognitif, le quotidien pour aller vers la connaissance et le respect de la personne-enfant .

 

Enfin pour Francesc Ferrer outre quelques rares écoles ou de places qui portent son nom  essentiellement en Belgique wallone, région nantaise, et Catalogne, seuls, 32 établissements répartis dans cette même zone s’inspirent des ses préceptes pédagogiques  Nos sociétés contemporaines  ont laissé l’Ecole Moderne de Ferrer faire partie des laissés-pour-compte de l’histoire mais l’utopie qui la nourrissait s’est incarnée dans des courants pédagogiques toujours présents.

 

Monument à Ferrer (Bruxelles 1910)

Monument à Ferrer (Bruxelles 1910)

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