En novembre 2009 j’assistai à une belle cérémonie célébrée à la Daurade et écrivait cet article pour les personnes âgées de la Résidence des Minimes ne pouvant plus se déplacer.
ADORATION A LA VIERGE DE LA DAURADE
La toute nouvelle Association pour la Promotion du Patrimoine de la Daurade a apporté sa contribution à l’éclat de la Vierge Noire Notre-Dame de la Daurade en sollicitant de grands couturiers pour la rénovation de son trousseau. Dédié surtout aux femmes enceintes ou désireuses de l’être, le culte de la Vierge Noire remonte au X° siècle et est toujours bien vivant. L’histoire témoigne de la dévotion des fidèles et des miracles de la Vierge.
Au début du XIII° siècle, en 1212, lors de la « Croisade des Albigeois » Simon de Montfort investit “Toulouse la grande”. Le peuple , les bourgeois et les nobles vont prier la Vierge de la Daurade et, tandis que l’armée des envahisseurs s’attaque aux tours de la rive gauche, une crue violente endommage le pont de la Daurade semant trouble et confusion parmi les assaillants qui abandonnent la place. La «Chanson de la Croisade» rapporte ces faits et mentionne Notre-Dame. Peu de temps après la statue miraculeuse disparaît suite aux disputes de deux prieurs. Elle réapparaît en 1248 à Solsona en Catalogne sous le nom de la Mare de Deu del Claustre. La statue est nouvelle dans ces lieux, mais pas neuve. Elle a plus d’un siècle et est signée semble-t-il du Maître toulousain Gilabertus. De facture purement romane elle ressemble assez à la Vierge Noire de Montserrat, objet de grande dévotion en terres catalanes.
A Toulouse une nouvelle statue de bois prend sa place. Elle a été taillée à Auch en cette fin du XIII° par un sculpteur du nom de Raynaldus et, de facture romane, ressemble à la précédente. Si le vocable Notre-Dame la Noire apparaît au XVI° c‘est que le temps et les chandelles ont marqué l’image. Le plus souvent on l’appelle Notre-Dame la Brune. C’est à elle que depuis 1314 les Troubadours remettent en grande pompe chaque 3 mai les Fleurs d’or et d’argent qui ont récompensé leurs meilleures oeuvres aux Jeux Floraux de la ville .
Quand un fléau - feu, sécheresse, inondation - menace Toulouse, les Capitouls font un voeu à la Vierge Noire. On fait alors sa « descente », c’est-à-dire sa procession dans la cité. Rares furent les déceptions. Lors du grand incendie de 1672, « dès que l’image fut parvenue devant ledit incendie, le vent qui poussait auparavant le feu avec grande violence sur les maisons de la ville, se changea incontinent »(témoignage d’époque).
Les temps révolutionnaires amenèrent la fermeture de la basilique de la Daurade. La statue fut transférée au tout nouveau musée de la ville le 3 octobre 1794. Réclamée par les commissaires de l’église elle fut finalement rendue et le peuple accourut pour la vénérer. L’adoration dura trop et ordre fut donné par le Département d’enlever la statue par la force des armes. On déshabilla l’icône, vola ses plus beaux effets avant de la conduire à la Maison Commune. Un témoin raconte : “La dernière escorte de Notre-Dame-la-Noire s’éloigne dans la nuit. L’étonnante carrière de la Madone des Toulousains s’achève dans un décor de Vendredi-Saint, sous les insultes des valets, avant le chant du coq. La statue tant vénérée disparaît, brûlée dans le foyer du corps de garde de la Maison Commune ».
En 1807 le culte reprit avec une nouvelle statue qui est celle que nous connaissons.
Dans la basilique le Grand Livre, au pied de la Vierge, témoigne au jour le jour de la reconnaissance des fidèles. Chacun peut lire ces écrits et voir aussi les nombreux ex-voto dont le plus remarquable, une plaque de marbre plus grande que les autres, dévoile la dévotion de l’archiduchesse d’Autriche un peu avant les événements tragiques de Sérajévo (1914).Au pied de cet ex-voto on pouvait voir lors de la présentation au public du nouveau trousseau de notre-dame, une création du grand couturier Charles de Castelbajac nommée « Robe de la paix » qui en surprit plus d’un par son originalité et esthétisme : long manteau noir au tissu brillant semblable aux écailles du serpent écrasé par la Vierge dont la robe révélait les couleurs de l’uniforme des Soldats de la Paix luttant de par le monde.
La mise en scène « son et lumière » de Françoise Puyater, qui ce 14 novembre accompagnait cette présentation exceptionnelle, fut une belle réussite.Un savant jeu d’ombres et de couleurs exaltait la beauté des vêtements exposés dans le chœur et les chapelles latérales. Chacune des 7 robes neuves, rebrodées, enrubannées, portait la signature de leur créateur et rappelait la symbolique du vêtement : couleur or pour la Gloire de Dieu, rose pour la Joie , argent pour la Naissance et la Résurrection, violet pour les temps de Pénitence, rouge pour la Passion…Françoise Navarre signait pour la création toulousaine une magnifique robe en brocard brodé beige rosé ornée de roses du même tissus présentée tout à côté du maître autel. Le Lycée Myriam apportait la touche couture de jeunes petites mains et Jean Michel Broc le rayonnement de la Haute-Couture avec une éblouissante robe blanche pour Noël ... 5 robes anciennes aux fines dentelles d’époque ou issues des ateliers de dentellières de Toulouse et région complétaient l’exposition. La Vierge à sa place dans sa chapelle portait pour l’occasion sa plus somptueuse robe ancienne véritable joyau de 6 kilos de fils d’or et d’argent .
Dans la Daurade noire de monde tous furent invités à partager Création, Art et Sacré.
Le spectacle alterna Louanges à la Vierge, grand orgue, récitatif, page du Coran, guitare, lecture de poèmes inédits de Claude Nougaro , textes de José Cabanis et voix incomparable du violoncelle. « Nous croyons que l’Art appartient à tous, au-delà des croyances religieuses. C’est pour cela que nous avons conçu ce spectacle, non pas comme une messe mais comme une manifestation pour que tout le monde puisse venir » (Marcel Baurier, vice-président de l’association et ancien curé de la Daurade).